Par la même occasion je me disais que je n’aurai pas le temps d’aller bien loin, mais à défaut d’en avoir assez pour envisager un Road-Trip au format honorable, je pouvais toujours le ralentir ce fleuve qui ne s’arrête jamais.
Ces derniers temps, justement ; et vous pouvez y mettre n’importe quel ordre de grandeur ( jour, semaine, mois…) avait tendance à se répéter sur le mode « Bad Replay ». Du déjà vu, du déjà vécu, avec sa cohorte d’impondérables dus à bien des vicissitudes par trop connues.
Alors j’ai dû faire un effort, tout à fait étonnant et inquiétant, pour me secouer un peu et me décider à mettre entre parenthèses tout ce que j’égrenais sur mon chapelet à Emm… pour justifier le fait que j’avais boudé ma Belle. Reléguée au garage sous une pluie de particules de poussière, l’enveloppant d’une gangue aux reflets estompés et obscènes.
Ouais, j’en étais là ce matin ou je me suis dit que ce n’était plus acceptable d’en être à trouver de plus ou moins bonnes raisons pour laisser la Multi dans un silence qui ne lui sied guère et la négliger au point de ternir son éclat d’une couche de poussières ayant chu sur son habituel éclat d’un rouge séduisant, devenant injure et mépris.
Ne voilà-t-il pas que je me mets à lui parler. Timide salut auquel elle ne peut répondre et pourtant… Ma parole, je deviens marteau ! Voilà que je parle à une machine. Oui, mais c’est plus que cela une Ducati et encore plus une Multistrada !
Allez, un méchant coup de plumeau, de chiffon doux et revoilà le reflet habituel qui vient de nouveau imprimer mes rétines.
Un petit effort supplémentaire pour la libérer de ses appuis et….pousse dehors, que la lumière lui rende sa couleur avant de faire entendre ses premières clameurs en priant silencieusement que le démarreur réveille son horlogerie secrète.
Aaah Joie ! Ça s’ébroue et on entonne les premières mesures de cette symphonie mécanique qui pour moi est un chant unique.
Tel un cavalier appliqué je l’ai flanquée de ses sacoches souples remplies de l’inventaire dédié à ; presque, tous les coups durs.
Ça tourne rond, la température s’élève vers les sommets attendus et il est temps, enfin de commencer à réveiller des sensations évanouies au fil du temps.
Le Temps. Pour être sûr de le ralentir encore je coupais tout signal d’appel du mobile que je trimballe, histoire qu’un outrecuidant ne vienne pas rompre le rythme recherché.
J’aurais pu le laisser sur mon bureau, mais comme je partais solo ce ne serait pas prudent en cas de…d’impondérable. Et puis n’oublions pas cette application rassurante : Liberty Rider !
Pas possible de bénéficier de cet ange-gardien virtuel sans le gadget mobile qui le fait fonctionner. Et puis comme ce cher Murphy et sa foutue Loi ne sont jamais très loin, il suffirait que je néglige le « truc » pour qu’arrive ce qui ne devrait pas arriver.
Seule concession au fait que je ne voulais rien qui menace les quelques …temps de calme que je recherchais.
Vu que le Pain Quotidien est resté sur la Planche, je ne pouvais pas, encore, m’échapper pour une balade format « sérieux ». Ce sera plutôt format court, mais je l’espère bien apaisant.
Il est vrai que nous habitons une contrée où sévissent d’horribles besogneux dont la raison d’être est la Création. Non, pas la Divine, hein, non. La Création d’une pléthore de documents, procédures, comptes-rendus ( mais pas de RT dans ce cas là) divers et, qui plus est, affublés de sigles et autres numéros cabalistiques aussi abscons qu’obligatoires. Gare à la méprise, l’erreur, la négligence qui engendreront les Foudres de ces paperassiers carnassiers.
J’invitais donc, mentalement, cette population de parasites administrant aux administrés leurs préceptes pénibles à aller se faire voir au chapitre Astronomie, rubrique Galaxie Lointaine, très lointaine.
Me voilà enfin parti. Doucement les cylindres laissent échapper leurs accords et une subtile chaleur commence à me chatouiller les guiboles. Cycle urbain, allure style chagrin et attention dévolue au crétin qui ne saura jamais distinguer sa droite de sa gauche. Tu ne seras jamais bon marin mon pote. Si tu ignores droite et gauche, que dire de Bâbord et Tribord, Rouge et Vert. Reste à terre, c’est plus sur.
Mais hélas pas pour nous pauvres motards. Ça clignote à droite, mais le dubitatif tourne à gauche , un ex-européen Britannique peut-être ?
J’avais presque oublié ces tristes « rigolos ». Heureusement, gouverner c’est prévoir et les quelques restes d’époque Marine me firent louvoyer adroitement pour éviter ce « gauchiste » obstiné.
Bord de mer me voilà. Encore une fois longeant la Corniche Bonaparte puis Tamaris et je continuais à « pousser » vers la Presqu’île de Saint-Mandrier. En abordant les premiers virages je collais au sillage nauséabond d’un « bahut » de tonnage moyen, genre livreur fâché avec son diéséliste.
Ça me bouche l’horizon et remplit mes nasaux d’une vapeur âcre et noirâtre. Bon, un petit coup de gaz devrait me permettre de larguer ce pollueur pénible…mais non. « Môssieur » accélère puis…freine en vue de chaque virage, m’interdisant le dépassement.
Ok, on va te laisser à ton jeu stupide, je te scotcherai un peu plus loin. Ce fut le cas. A’T’chao casse-pieds !
Je ralentis tranquillement, le village de Saint-Mandrier et la route qui longe le port ne sont pas propices à laisser rafales de décibels et courants d’air sur ma trajectoire ; formellement interdit et surtout déraisonnablement imprudent !
Ça y est, on est au bout, au bout d’un monde. J’effectue mon demi-tour devant l’entrée de ce qui fût, autrefois, l’Hopital Maritime de Saint-Mandrier puis l’Ecole des Apprentis Mécaniciens de la Marine et je repars dans l’autre sens.
Toujours à faible allure je laisse le port derrière moi et je vais de l’autre côté, face à l’Ecole de Plongée de la Marine. Je parque la machine sur un parking me laissant distinguer Saint-Mandrier à droite et Toulon et sa rade à ma gauche.
Un banc judicieusement posé derrière « ma place » de parking est le bienvenu pour une pause-rêverie.
Engine Stop ! Et d’un coup le silence. Quelques mouettes tracent leurs arabesques dans le ciel, ce dernier ayant peine à laisser passer quelques rayons de soleil. Encore une météo menteuse, pourtant annoncée comme « ensoleillée ».
Je dirais plutôt « soleil voilé », très épais le « voile », format Misaine Opaque !

Qu’importe, me voilà en plein instant de paix. L’auguste téléphone mobile rendu muet, presque pas âme humaine et surtout pas de véhicule terrestre venant troubler ces instants de contemplation Marine. Pas d’autre écran à contempler que celui qui est devant moi, naturel et vrai, sans message, sans sonnerie, sans alerte.
Et l’horloge ralentit encore, plusieurs regards sur mon quadrant de montre et cette impression que « ça n’avance pas »…mission accomplie. Pas forcément besoin d’aller bien loin pour rompre avec le rythme habituel.
Bon, je remets le couvert et trajet strictement inverse cette fois-ci sans diesel fumant devant moi. Il est temps de faire une petite escale « pause-café » à la terrasse de mon estaminet préféré.
Encore une autre façon de goûter au « Temps qui passe » mais sans m’en soucier.
Le petit jus bien chaud dispense ses bienfaits réconfortants et c’est encore un vrai bonheur que de laisser filer…le temps devant un spectacle souvent contemplé et toujours apprécié.
Un dernier regard et ce sera le dernier coup de démarreur pour afficher le cap retour au bercail.
La paperasse est toujours là sur la Planche… « à faire ». Mais demain est un autre jour.
Vivement le prochain voyage…dans le Temps !
Envoyé de mon iPad en utilisant Tapatalk Pro
….merci pour être toujours aussi bon public 
….
, environ 180 km, dont je vous laisse l'image et quelques photos prises sur la route. Il n'y avait pas de banc non plus alors j'ai roulé
